Recevabilité de la constitution de partie civile et abus de confiance
Dans un arrêt du 20 mars 2019, la chambre criminelle de la Cour de Cassation rappelle qu'une société présente un intérêt légitime à se constituer partie civile lorsque les biens meubles lui ayant été confiés temporairement par son client en vue de leur transport ont fait l’objet d’un détournement par la salariée chargée de les acheminer.
Les faits étaient les suivants:
Une société avait conclu avec son client une convention par laquelle elle était engagée à acheminer des déchets de métaux de prix appartenant à ce dernier. Le chauffeur, en charge de ces convoyages, avait déchargé ces marchandises, environ une fois par semaine sur une période de plus de deux ans, sur le site d’une société de recyclage à laquelle il les avait vendues. La salariée de la société , en l'espèce le chauffeur, chargée de l’acheminement a été condamnée pour abus de confiance mais le tribunal a déclaré irrecevable la constitution de partie civile formalisée à l’audience par la société employant la prévenue.
La cour d’appel a infirmé le jugement.
Selon elle, la désignation des victimes dans la prévention, non limitative, ne lie pas la juridiction de jugement et la société employant la salariée justifie d’un intérêt à agir d’ordre pécuniaire.
L’employée a formé un pourvoi en cassation, soulevant qu’elle était poursuivie pour des faits d’abus de confiance au préjudice de la société cocontractante et non pas de son employeur.
Elle a ensuite reproché à la cour d’appel de ne pas avoir recherché si son employeur pouvait être considéré comme le détenteur des métaux détournés au moment de leur remise à la salariée et de ne pas avoir dit en quoi cette société avait subi un préjudice personnel résultant directement des faits constitutifs d’abus de confiance.
Ainsi se posait la question de savoir si une société a un intérêt légitime à agir lorsque les biens meubles qui lui ont été confiés temporairement par son client en vue de leur transport ont fait l’objet d’un détournement par la salariée chargée de les acheminer ?
La chambre criminelle reconnaît que l’infraction d’abus de confiance a été réalisée au préjudice du propriétaire des chutes de métaux mais également de la société intermédiaire chargée de les acheminer.
Énonçant la solution de la cour d’appel, elle a exposé que « l’abus de confiance peut préjudicier et ouvrir droit à réparation, non seulement aux propriétaires, mais encore aux détenteurs et possesseurs des biens détournés, victimes d’un préjudice résultant directement de l’ensemble des éléments constitutifs de l’infraction ».